
ENSEMBLE MÊTIS / Spectro Duo
OCÉAN
PROGRAMME
Participants of NIMFA Academy - Horizon Étendu:
Yalda Jahangiri (Ir) Desiderium* (2025), 10’,pour flûte, clarinette, piano, violon et violoncelle
Alireza Seyedi (Ir) Influx* (2024), 12’, pour clarinette, violon et violoncelle et bande
–––––– ENTRACTE ––––––
Concert :
George Crumb (Us) Vox Balaenae (1971), 19', pour flûte, violoncelle et piano amplifié
Vocalise (… for the beginning of time)
Variations on Sea-Time
Sea Theme
Archeozoic [var. I]
Proterozoic [var. II]
Paleozoic [var. III]
Mesozoic [var. IV]
Cenozoic [var. V]
Victor Ibarra (Mx, Fr) Géographie de la mémoire* (2025), 10’, pour saxophone, piano, violon, alto et violoncelle.
Commande d’Ibermúsicas pour l'Ensemble Mêtis.
Kaija Saariaho (Fr/Fl) New Gates (1996), 12’, pour flûte, harpe et alto
Dieter Ammann (Ch) Gehörte Form -- Hommages (1998), 6’, pour trio à cordes
Jean-Luc Hervé (Fr) Premières secousses* 10’, pour saxophone, piano, violon, violoncelle et contrebasse et dispositif Pré.
Commande du 3imc et de l'Ensemble Mêtis
*Création mondiale
Durée
90 Minutes
En juin 2025, Nice devient le point de convergence de la réflexion mondiale sur l’avenir de nos océans en accueillant la troisième Conférence des Nations Unies sur l’Océan. En écho à cet événement d’envergure, le Festival NIMFA clôture sa première édition avec un concert qui célèbre la relation intime entre musique et océan.
Ce programme invite à une immersion musicale où se mêlent contemplation, mouvement et innovation. Il s’ouvre sur Vox Balaena, l’œuvre emblématique du compositeur américain, George Crumb, inspirée du chant des baleines. Utilisant des modes de jeu particuliers et une amplification, la pièce crée une atmosphère mystique et intemporelle, évoquant l’immensité des océans et la voix profonde de la nature.
Au cœur de la soirée, une œuvre inédite de Jean-Luc Hervé, commandée pour l’Ensemble Mêtis, explore la fluidité et la propagation de l’eau. À l’aide du Dispositif Pré, un réseau de haut-parleurs miniatures répartis dans le public, l’œuvre offre une expérience sonore immersive qui transcende l’espace de l’auditorium. Ce dialogue entre innovation technologique et interprétation sensible reflète l’essence du festival : un espace d’expérimentation et de création contemporaine.
La soirée met également à l’honneur deux compositeurs émergents de l’Académie NIMFA - Horizon Étendu, tels que Yalda Jahangiri et Alireza Seyedi, les deux vivent et travaillent en Iran. Ces créations côtoient des pièces de figures majeures de la musique contemporaine, comme Kaija Saariaho et Dieter Ammann, dont les langages musicaux enrichissent cette mosaïque sonore.
Ensemble Mêtis donne également vie à la nouvelle pièce du compositeur mexico-français, Victor Ibarra. Le public de cette soirée sera le premier à écouter écouter cette œuvre qui repose sur une tension entre le contrôle du compositeur et l’autonomie laissée aux interprètes, ouvrant ainsi des chemins d’interprétation multiples.
Avec ce concert, le Festival NIMFA affirme son ambition de faire dialoguer cultures, sensibilités et idées. L’océan, métaphore universelle de vie, de mouvement et de connexion, devient ici source d’inspiration et de partage. Une soirée qui captive, émeut et transporte, au croisement de l’art et de l’écologie.
NOTICE
George Crumb – Vox Balaenae
Comme le nom de l’œuvre l’indique, Vox Balaenae s’inspire du chant des baleines. À la fin des années 60, George Crumb entendit un enregistrement préparé par un océanographe des sons émis par la baleine à bosse… En 1971, Crumb puisa son inspiration de ces sons.
Bien que la pièce comporte 8 mouvements, ils sont structurellement regroupés en trois parties : le premier mouvement « …for the beginning of time », 5 variations qui tirent leur nom de périodes géologiques, et le dernier mouvement « … for the end of time ».
Lors de cette performance, il est demandé aux musiciens de porter des demi-masques noirs. Il est de même fortement recommandé, dans la mesure du possible, que la performance se déroule sous un éclairage bleu.
Victor Ibarra – Géographies de la mémoire
Cette pièce est née d'une réflexion à propos de la manière dont une étendue d'eau peut représenter l'idée d'une division géographique, identitaire, culturelle ou conceptuelle. J'ai trouvé intéressante la manière dont les êtres humains prennent, peut-être parfois inconsciemment, certaines manifestations de la nature comme un symbole, en leur attribuant une signification. Les différentes masses d'eau – qui peuvent varier au fil des années en fonction des différentes circonstances : changements climatiques, déplacements tectoniques, etc.– ont été historiquement considérées par les êtres humains comme une séparation territoriale et même identitaire. D'autre part, les ressources techniques, tant individuelles que collectives, et l’ambitus expressif des instruments de cette pièce sont impliquées dans cette dynamique de recherche identitaire et conceptuelle et tentent de proposer une géographie sonore qui se situe dans le concept de la recherche de cette frontière. Une démarcation qui pourrait bien se situer entre la richesse expressive des instruments à vent en opposition aux instruments à cordes, ou l'expressivité du timbre de chacun des instruments et leurs différents modes d'exécution, ou bien dans une perspective différenciée à partir des réalités sonores opposées. Certains de ces contrastes pourraient être établis comme une analogie avec le concept de frontière et la recherche d'une différenciation identitaire, ou peut-être comme la manifestation inconsciente d'un nécessité inné de construire une mémoire à partir d’une identité personnelle mais aussi collective.
Kaija Saariaho - New Gates
New Gates is an adaptation of Gates, a movement from the ballet Maa (the harp taking over the ornate cembalo part), and can be understood as a synthesis of Kaija Saariaho's musical thinking in the 1990s, in which the interplay of sound parameters has moved from a stricter focus on timbre and harmony to a full use of all parameters. The three instruments, each unfolding very different lines idiomatic of Saariaho's writing for them, move closer and away from each other, and in the overlaps and interstices new wide landscapes seem to open out of sparse means.
Jean-Luc Hervé – Premières secousses
L'idée musicale à l'origine de la pièce fait appel à l'imaginaire des forces telluriques, celles capables de faire trembler le sol, celles qui fissurent, déplacent, transforment. À la fois inquiétantes et fascinantes, ces forces remettent en cause nos certitudes, nos fondements, et rappellent que rien est immuable. Comme le sol lors des tremblement de terre, la musique gronde, et les ondes musicales deviennent ondes sismiques.
L'effectif de la pièce, constitué en partie d'instruments graves capables de libérer une grande énergie, a été choisi pour explorer les sonorités sombres et tremblées. En utilisant notamment au saxophone baryton les catégories de multiphoniques produisant des interférences et à la contrebasse une scodatura pour réaliser des doubles sons dans l'extreme grave, la musique développera une matière sonore ébranlée par de grandes vibrations.
La forme se présentera comme une alternance de moments fortissimo, de mise en vibration du matériau musical, suivis de moments où la propagation de cette vibration animera un second matériau, au départ diaphane et pianissimo. À chaque réitération des sections fortissimo, la propagation du mouvement prendra de plus en plus d'ampleur pour culminer dans une section de piano solo. L'instrument préparé diffractera cette énergie accumulée dans des gestes fragmentés, comme des débris de sons restants après la fissuration et la destruction du matériau musical sous l'effet de ce soulèvement sonore. Le solo de piano préparé laissera émerger à son tour une coda électronique diffusée sur le réseau de 24 haut-parleurs du dispositif Pré, cachés et posés au sol sur toute l'étendue de la salle parmi le public. Cet ultime développement du matériau sonore sera constitué d'impulsions graves répétées, formant une polyphonie de vibrations déployées sur toute l'étendue de la salle de concert, comme une gigantesque stridulation d'une population d'insectes monstrueux mettant en vibrations le lieu.
métaphore politique. Si dans un art abstrait tel que la musique contemporaine sans narration ni représentation, la relation au monde semble lointaine, un partage du sensible avec le politique reste possible. Et c'est peut-être justement par sa forme plus que dans ses contenus que l'art ouvre des mondes. Le titre de la pièce, Premières secousses reprend celui du livre des Soulèvements de la Terre où le collectif dresse un panorama de ses actions dans sa défense de l'environnement. Les fondements idéologiques de nos sociétés, sous l'emprise d'une idéologie capitaliste destructrice des liens sociaux et des écosystèmes, peuvent, à la faveur d'une faille, trembler sous l'effet de forces s'associant dans des combats locaux ; premières secousses comme point de départ de la propagation d'idées et d'initiatives pour un changement radical de notre rapport au monde.
Fondé en 2024, l'Ensemble Mêtis émerge comme un acteur majeur de la scène musicale contemporaine à Nice. Eponyme de l'Océanide de la mythologie grecque, Mêtis puise sa force dans la diversité de ses membres, issus d'horizons variés, ce qui lui confère une richesse culturelle singulière. Cette diversité constitue la source même de son nom et de ses inspirations artistiques, qui s'enracinent profondément dans le terreau culturel de la ville. Grâce à cette identité plurielle, l'Ensemble Métis tisse des liens étroits avec des événements majeurs de la ville tels que le festival Horizon Étendu, et s'engage dans des collaborations fructueuses avec la nouvelle génération de compositeurs, ainsi que les compositeurs renommés à l 'échelle internationale.
En tant qu'ambassadeur de la musique contemporaine, l'Ensemble Métis a pour mission première la création et la diffusion d'œuvres novatrices. Porté par la vision du compositeur Alireza Farhang, il réunit des musiciens émérites, à savoir le flûtiste Mario Caroli, le pianiste Stephanos Thomopoulos, la violoniste Violaine Darmon, le saxophoniste Alberto Chaves et l'altiste Yona Zekri. Ensemble, ils travaillent activement à la promotion de la création musicale contemporaine et s'engagent pleinement dans l'éclosion de nouveaux talents.
Bien que Nice soit depuis longtemps un foyer artistique florissant, la nécessité d'un ensemble spécialisé dans la musique de création et les projets interdisciplinaires restent indéniables. Face aux défis et aux opportunités de notre époque, Nice se trouve à un carrefour décisif. Cette conjoncture révèle à la fois la fragilité et la vitalité de la création artistique. Dans ce contexte, la création d'un nouvel ensemble tel que l'Ensemble Métis, incarnant à la fois l'innovation artistique et l'ancrage local, s'avère être une étape essentielle. Ce projet, porté par un compositeur et quatre interprètes de haut vol, symbolise un nouveau départ, renforçant ainsi les liens avec les institutions et les acteurs culturels locaux, nationaux et internationaux, au sein d'un écosystème artistique dynamique et fécond.
BIOGRAPHIES
Yalda Jahangiri
Elle commence le piano à l’âge de 10 ans à Neyshabour, sa ville natale. Elle poursuit ensuite ses études dans ce domaine avec Arpineh Israyelian à l’Université de Téhéran, où elle obtient une licence en interprétation pianistique. Durant ses années universitaires, elle développe une passion pour la composition et se consacre à l’étude de la théorie musicale et de l’analyse harmonique auprès de Sarah Abazari, Azin Movahed et Masoud Ebrahimi. En 2022, elle suit des cours de composition avec Karen Keyhani, où elle affine ses compétences en création musicale contemporaine pour instruments acoustiques. À la fin de cet été-là, elle participe à un atelier de composition contemporaine animé par Ardavan Vossoughi, avec qui elle poursuit ensuite ses études musicales.
Ses compositions incluent des œuvres pour instruments solistes ainsi que pour divers ensembles instrumentaux. Depuis, elle se passionne pour la composition contemporaine ; l’une de ses œuvres récentes, écrite pour saxophone baryton et contrebasse, a été retenue dans l’appel à partitions de Seyr à l’été 2023. À l’automne 2023, elle est sélectionnée pour participer à l’académie Horizon Étendu, où elle travaille avec Jean-Luc Hervé et Idin Samimi Mofakham.
Alireza Seyedi
Alireza Seyedi est né en novembre 2001 à Sari, en Iran. Il commence la musique dès son plus jeune âge par l’apprentissage de la musique traditionnelle iranienne et choisit le kamancheh comme instrument principal. Il débute son apprentissage du kamancheh avec Sina Danesh, avant de se consacrer à l’étude des radifs traditionnels iraniens. Il entame parallèlement des études de composition avec Hossameddin Darabi.
Au départ, la présence de la musique iranienne dans ses œuvres était très marquée, mais elle s’est peu à peu transformée vers une forme d’abstraction, jusqu’à intégrer un langage personnel tout en conservant certaines caractéristiques de cette tradition.
Il poursuit ensuite des études en composition de musique électronique avec Sohrab Motabar. Il compose de la musique électronique à l’aide du logiciel Max/MSP, un environnement de programmation graphique qui permet de créer des algorithmes pour générer de la musique. En approfondissant sa formation, il explore également les technologies électroniques interactives, notamment l’utilisation de l’Arduino et de modules électroniques, toujours avec Sohrab Motabar ainsi qu’avec Vesal Javaheri.
Il poursuit ensuite ses études avec Elnaz Seyedi, et dans diverses académies internationales, notamment avec Lidia Zielinska lors de l’Académie Horizon Étendu.
George Crumb
George Crumb étudie à l'Université de l'Illinois, à l'Université du Michigan avec Ross Lee Finney (1954), au Berkshire Music Center, puis à Berlin avec Boris Blacher (1955-1956). Il enseigne à l'Université du Colorado de 1959 à 1964, puis à partir de 1965 et pendant trente ans, à l'Université de Pennsylvanie. Il reçoit le prix Pulitzer 1968 pour Echoes of Time and the River pour orchestre (1967), le prix de l'UNESCO en 1971 ainsi que les prix des fondations Fromm, Guggenheim, Koussevitsky et Rockefeller, la Médaille d'or Prince Pierre de Monaco en 1989 et la nomination de Compositeur de l'année par Musical America en 2004.
Sa musique, souvent d'une concision et d'une austérité issues tout droit de Webern, marquée aussi par l'influence de Debussy et des traditions orientales, doit sa forte originalité à ses sonorités, ses aspects rituel et mystique et témoigne d'une intense sensibilité poétique. Nombreuses sont ses œuvres basées sur des poèmes de Federico García Lorca – les quatre livres de Madrigals pour soprano, percussion, flûte, harpe et contrebasse (Book I et II, 1965, III et IV, 1969), deux des sept volets de Night Music I (1963), ainsi que les pièces pour voix et ensemble Songs, Drones and Refrains of Death (1968), Night of the Four Moons (1969), Ancient Voices of Children (1970), Federico's Little Songs for Children (1986), et récemment encore, deux premières composantes d'un Spanish Songbook, The Ghosts of Alhambra (2008) et Sun and Shadow (2009).
Pour réaliser ses subtils effets de timbres, reflets de son désir de « contempler les choses éternelles », Crumb élabore de nouvelles techniques d'exécution et fait appel à des instruments des musiques populaires et traditionnelles. Son style de maturité se manifeste d'abord dans les Cinq pièces pour piano de 1962. On lui doit dans ces années de nombreuses pièces de musique de chambre – Night Music II (1964), Eleven Echoes of Autumn (1965), Black Angels (in tempore belli) reflet de la guerre du Vietnam, pour quatuor à cordes électrique (1970), Vox balaenaepour flûte, violoncelle et piano amplifiés (1973) et le cycle des Makrokosmos, inspiré des signes du Zodiac – I pour piano, II pour piano amplifié, III pour piano et percussion (1972-1974) et (IV-Celestial Mechanics, 1979).
Suivent Star-Child pour soprano et orchestre, œuvre dirigée par quatre chefs donnant chacun un tempo différent (1977, Grammy Award de la meilleure composition contemporaine lors de son édition discographique en 2001), Apparition pour mezzo-soprano et piano (1979), Gnomic Variations pour piano (1981), A Haunted Landscape pour orchestre (1984), The Sleeperpour soprano et piano (1984).
Dans les années quatre-vingt dix, jusqu'à ce qu'il se retire de l'enseignement en 1997, George Crumb se consacre essentiellement à ses élèves. Quest pour guitare et ensemble (1990-1994) et Mundus Canis (A Dog's World) cinq humoresques pour guitare et percussion (1998) sont ses principales productions.
Outre les pièces pour piano, Eine Kleine Mitternachtmusik, sur un thème de Thelonious Monk (2002) et Otherworldly Resonances pour deux pianos (2003), parmi son travail récent, prédomine le grand cycle American Songbook, commencé en 2001 avec Unto the Hills et suivit de River of Life, A Journey Beyond Time, Winds of Destiny, Voices from the Morning of the Earth ; Voices from the Heartland, septième pièce de ce cycle, est créée en janvier 2012.
Victor Ibarra
D’origine mexicaine, Victor Ibarra a bénéficié, d’une formation très riche, tant dans son propre pays qu’en France et en Suisse, avec des musiciens de renom tels que Hebert Vázquez, José Luis Castillo, Edith Lejet, Daniel D’Adamo ou Michael Jarrell. Il a reçu les reconnaissances internationales suivantes : le premier prix du concours Alea III aux États-Unis, le premier prix du concours Auditorio Nacional de Música – Fundación BBVA en Espagne, le premier prix du concours Mauricio Kagel, le Prix du concours Zeitklang en Autriche, ou le premier prix du concours Basel Composition Competition en Suisse, entre autres. Lauréat du 7ème Forum International des Jeunes compositeurs de l’Ensemble Aleph, Victor Ibarra a également été nommé pensionnaire de la casa de Vélazquez – Académie de France à Madrid pour l’année 2014-2015.
Il assiste régulièrement à l’exécution de ses œuvres qui ont été magnifiquement interprétées par des formations de renommée internationale. Victor Ibarra a achevé sa maîtrise en composition au CNSMD de Lyon, en remportant le premier prix à l'unanimité et la distinction de la Fondation Salabert. À partir de 2014, il est membre du Sistema Nacional de Creadores de Arte (Système National de Créateurs d’Art) du Fonds Nationaux pour la Culture et les Arts du Mexique.
Le style de Victor Ibarra s'appuie sur les ressources les plus variées qui forment un véritable langage. Chaque partition est immergée dans la micro-tonalité, avec une structure harmonique précise qui se développe de manière imbriquée et obsessionnelle. Cela s’accentue par une énergie rythmique particulière qui devient un élément essentiel de son discours ; ou bien, par l'utilisation de la virtuosité instrumentale comme outil de création des espaces et des dimensions. L'influence du spectralisme français permet à Victor Ibarra de travailler avec une intention coloriste et timbrale, mais pas exclusivement. Un dialogue interdisciplinaire, souvent avec les arts plastiques, imprime une marque personnelle à son travail qu’il aborde avec clarté, selon ses instincts et ses idéaux de composition.
Depuis 2017, il est Professeur de Composition et Orchestration à L’Université de Guanajuato, où il est aussi, depuis 2019, directeur du Festival International Callejón del Ruido.
Kaija Saariaho
Kaija Saariaho (1952–2023) fut l’une des voix majeures de sa génération de compositeurs, en Finlande, son pays natal, comme sur la scène internationale. Elle a étudié la composition à Helsinki, Fribourg et Paris, où elle s’est installée en 1982 et y a vécu jusqu’à sa mort. Ses recherches à l’IRCAM, centre parisien de recherche en musique électroacoustique, ont profondément influencé son langage musical. Ses textures luxuriantes et mystérieuses, caractéristiques de son style, résultaient souvent d’un travail subtil entre interprétation instrumentale et électronique en temps réel.
Après son œuvre de révélation, Lichtbogen pour ensemble et électronique (1986), Saariaho a progressivement élargi son champ d’expression à une grande variété de genres. Ses pièces de musique de chambre et ses œuvres chorales sont aujourd’hui devenues des références pour de nombreux ensembles instrumentaux et vocaux.
Elle s’est imposée sur la scène internationale grâce à des œuvres jouées par les plus grands orchestres symphoniques, telles que Oltra Mar (1999), Orion (2002), Laterna Magica (2008) ou encore Circle Map (2012). Elle a également composé six concertos (dont Graal Théâtre pour violon en 1994 et Notes on Light pour violoncelle en 2006), ainsi que cinq cycles symphoniques vocaux majeurs (par exemple Château de l’âme en 1995 et True Fire en 2014). Toutes ces œuvres témoignent de son désir constant de fusionner une approche scientifique, technologique et rationnelle avec une inspiration poétique, pour aboutir à des expériences sensorielles et associatives profondes.
C’est dans le domaine de l’opéra que Kaija Saariaho a rencontré la plus large reconnaissance publique et critique. L’Amour de loin (2000), Adriana Mater (2006), La Passion de Simone (2006), Émilie (2010), Only the Sound Remains (2016) et Innocence (2020) – ce dernier qualifié de « chef-d’œuvre » par le New York Times – ont tous été chaleureusement accueillis lors de leurs créations. Ces opéras ont connu de nombreuses productions à travers le monde. Leur traitement expressif de la voix et de l’orchestre, ainsi que leur engagement dans le renouvellement de la forme opératique et des récits portés sur scène, ont déjà fait de ces six œuvres très différentes des classiques de l’opéra du XXIe siècle, de son vivant même.
Saariaho a reçu les plus hautes distinctions dans le domaine de la composition : le Grawemeyer Award, le Nemmers Prize, le Prix Sonning, le Polar Music Prize, ainsi que deux Grammy Awards pour ses enregistrements. En 2019, elle a été désignée « plus grand compositeur vivant » par ses pairs dans une enquête du BBC Music Magazine.
La vie de Kaija Saariaho a été brutalement interrompue en 2023 par une tumeur cérébrale. Son héritage musical perdure grâce au vaste réseau de collaborateurs avec lesquels elle a travaillé étroitement tout au long de sa carrière, ainsi qu’à son éditeur Chester Music Ltd.
Jean-Luc Hervé
Jean-Luc Hervé étudie l’orchestration et l’électroacoustique au Conservatoire national de Région de Boulogne-Billancourt puis la composition avec Emmanuel Nunes et Gérard Grisey au Conservatoire national supérieur de musique de Paris où il obtient un premier prix. Il complète sa formation à l'Ircam en 1996 par le Cursus sur les nouvelles technologies puis mène une recherche sur la composition assistée par ordinateur à l’Institut en 2001. Il est compositeur en résidence à la Fondation des Treilles en 1997, à la Villa Kujoyama à Kyoto en 2001 et au DAAD à Berlin en 2003.
Sa rencontre avec Gérard Grisey est déterminante. Sa thèse de doctorat d'esthétique ainsi que sa recherche menée à l’Ircam sont l'occasion d'une réflexion théorique sur son travail de compositeur. Sa résidence à la Villa Kujoyama à Kyoto, quant à elle, est un grand choc esthétique et un tournant décisif dans son œuvre.
Sa musique est jouée par des ensembles tels que l’Ensemble Intercontemporain, Court-Circuit, Contrechamps, musikFabrik, KNM Berlin, Divertimento, Orchestre Philharmonique de Radio-France, Orchestra della Toscana, Berliner Sinfonie-Orchester.
Il est lauréat du deuxième prix du Sixième concours Goffredo Petrassi pour Ciels en 1997 et ses deux disques monographiques reçoivent le Coup de cœur de l'Académie Charles Cros.
Jean-Luc Hervé est professeur de composition au Conservatoire à rayonnement régional de Boulogne-Billancourt et donne des cours et des séminaires à l’Abbaye de Royaumont, au Conservatoire national supérieur de musique de Paris, à l’Ircam, à Reggio Emilia (Italie) et à l’Institut français de Bilbao (Espagne). Il fonde en 2004 avec Thierry Blondeau et Oliver Schneller l’initiative Biotop(e). En 2022, Topos vient clôturer deux ans de résidence artistique à LUX scène nationale, avec un concert pour 8 musiciens de l'Ensemble l'Itinéraire et un dispositif craintif — déjà présent dans sa pièce BIOTOPE en 2019.
Une partie de son travail récent consiste en des œuvres de concert-installation conçues pour des sites singuliers, notamment des espaces ouverts de type jardin, par exemple au jardin de Kyoto, au jardin de la Treille ou encore au Parc de la Villette en 2020.